Le blog de Psychoscope – Une analyse critique du «healthy leadership»
En effet, des collaborateurs en bonne santé s’acquittent plus efficacement de leurs tâches, prennent plus volontiers en charge des fonctions dépassant le cadre de leurs attributions et restent plus longtemps dans l’entreprise.
Récemment, un nombre croissant d’études ont examiné le rôle joué par les cadres dans la santé et le bien-être de leurs collaborateurs. D’innombrables modèles théoriques de «healthy leadership» existent déjà. Il s’agit concrètement de concepts de management axés sur la santé, et non de concepts de management généraux comme le leadership transformationnel ou la théorie LMX (Leader-Member-Exchange) dont les interdépendances avec la santé et le bien-être ont déjà été clairement établies.

Cort W. Rudolph et ses collègues ont effectué pour la première fois une analyse systématique de l’activité de recherche relative au «healthy leadership». Ainsi, ils ont passé au crible 35 études basées sur huit modèles de «healthy leadership» et leur opérationnalisation correspondante. Nombre de ces études révèlent des liens avec des indicateurs de santé et de bien-être. Rudolph et ses collègues émettent cependant un certain nombre de critiques à leur égard. Des phénomènes/opérationnalisations distincts sont parfois désignés de façon identique (jingle fallacy), tandis que des phénomènes très similaires sont parfois désignés différemment (jangle fallacy). De nombreuses échelles de «healthy leadership» sont développées sans cohérence et insuffisamment validées. Beaucoup d’études présentent en outre des défauts méthodologiques comme un biais de confusion entre les comportements de «healthy leadership» et les variables de résultats examinées. Par ailleurs, la plupart ne vérifient pas les structures de management établies. Par conséquent, il n’est pas suffisamment prouvé que le «healthy leadership» est bel et bien un concept spécifique doté de ses propres relations de cause à effet positives.
Les cadres prennent davantage conscience de leur responsabilité
Rudolph et ses collègues demandent la (re)conception d’un cadre théorique uniforme et proposent un modèle correspondant. Ce n’est que lorsque la validité convergente, divergente et incrémentielle, au-delà des concepts de management établis, peut être prouvée et que des conditions-cadres causales essentielles comme des antécédents et des variables modératrices et médiatrices ont pu être identifiées que des interventions adéquates peuvent être élaborées et déployées efficacement en vue d’un développement des cadres lié à la santé.
Les chercheurs font enfin remarquer que la santé et le bien-être des collaborateurs peuvent déjà être influencés positivement par un comportement des cadres plus général, c’est-à-dire qui n’est pas explicitement en rapport avec la santé (par exemple une bonne organisation du travail ou la mise à disposition de ressources). Néanmoins, l’activité de recherche intensive concernant le «healthy leadership» pourrait aussi faire en sorte que les cadres prennent davantage conscience de leur responsabilité vis-à-vis de la santé et du bien-être de leurs collaborateurs. Ces aspects pourraient s’établir à l’avenir comme des critères déterminants pour l’évaluation des cadres. A une époque où les institutions se plaisent à rejeter la responsabilité de la santé sur les individus, cela semble primordial.
Etude
Rudolph, C. W., Murphy, L. D., & Zacher, H. (in press). A systematic review and critique of research on “healthy leadership”. The Leadership Quarterly, https://doi.org/10.1016/j.leaqua.2019.101335
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