Le blog de Psychoscope – La croissance psychique dans la vie quotidienne, la psychanalyse et l’art

Miriam Vogel
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Annemarie Andina-Kernen, psychanalyste SSPsa/IPA et ancienne présidente de l’Institut Freud de Zurich, présente dans son livre «Psychisches Wachsen» une vue d’ensemble de l’expérience de la croissance psychique à notre époque.

«L’ère des Lumières a révolutionné les sciences et apporté d’énormes progrès à l’homme. Suite à cette évolution, seule la pensée étroitement conceptuelle a été considérée comme scientifiquement valable, ce qui a entraîné une scission entre recherche empirique et non empirique, avec des conséquences négatives notamment pour la médecine et la psychologie. L’être humain a été divisé en corps et en esprit, en chair et en âme. Les approches herméneutiques et linguistiques, par exemple, ont ainsi décrit des phénomènes psychiques en se basant exclusivement sur la pensée consciente et les processus secondaires, conformément aux exigences de la pensée conceptuelle. Les processus inconscients n’ont pas été pris en compte» (Andina-Kernen 2021, p. 117).

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Miriam Vogel
Dr. phil.
Psychologue spécialiste en psychothérapie FSP, en psychologie clinique FSP et en psychologie de l'enfance et de l'adolescence FSP
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Andina-Kernen décrit en revanche le vécu, la perception et la compréhension de l’inconscient dans la vie quotidienne, dans la psychanalyse et dans l’art comme des symbolisations, des représentations et des métaphores qui se forment et créent du sens depuis la nuit des temps. «Les images intérieures du préconscient et de l’inconscient forment un bouillon de culture à partir duquel la pensée se cristallise en mots conceptuels, sans pour autant dissoudre cette réserve d’images nourrissantes. (...) La portée de l’activité imaginaire de l’être humain a ainsi une importance qui est généralement sous-estimée. Il faut accorder plus de poids au potentiel de l’imagination dans tous les domaines» (p. 118).

Dans la vie quotidienne, «en observant notre comportement à l’âge adulte et en prenant conscience de nos propres sensations, nous réalisons nos désirs et nos besoins. Nous pouvons les faire bouger en nous, dans notre espace intérieur, et y réfléchir. Nous réfléchissons à ce qui pourrait être mis en œuvre dans le monde réel, à la procédure qui serait appropriée ou à ce à quoi nous devrions éventuellement renoncer. Lors de cette réflexion, nous sommes en permanence en dialogue avec nous-mêmes» (p. 113) et nous nous connectons par conséquent à notre environnement. Nous développons ces capacités d’autoréflexion et de réalisation de soi en lien avec l’environnement dès le début de notre vie à l’aide de représentations intérieures.

En psychanalyse, «les personnes qui sont capable de se laisser aller au flux d’images intérieures associatives» sans que cela ne les traumatise à nouveau peuvent «rester en bons termes avec ce qui est vraiment ressenti» et «grandir» au-delà de ce qui est répété de manière non souhaitée (p. 119). Il y a une condition à cela: entre le thérapeute et le patient doit se créer «un espace intermédiaire, dans lequel ce qui est extérieur et objectif, d’une part, et ce qui est intérieur et subjectif, d’autre part, donc ce qui est et ce qui n’est pas, se rencontrent et s’entrecroisent. C’est une zone intermédiaire dans laquelle se développent des phénomènes, des sujets et des objets transitionnels. Ce sont des objets à la fois matériels, c’est-à-dire qu’ils existent vraiment, et qui, en même temps, n’existent pas vraiment puisqu’ils sont ce qu’ils représentent, à savoir une absence» (p. 114).

Dans l’art, comme dans la vie quotidienne, mais à l’inverse de la dimension temporelle intérieure, «la création artistique naît dans un état de grande émotion, un état de submersion par des sentiments forts, comme c’est le cas après une perte.» Lorsqu’il vit un état de «régression» psychique «féconde, le créateur artistique est submergé par les sens, mais aussi par les mouvements intérieurs, les impressions et les souvenirs. À l’échange complexe entre l’intérieur et l’extérieur, entre l’imaginaire et la réalité, entre la vision et la matière» s’ajoutent des désirs inconscients et des forces défensives «qui prennent la forme d’un compromis dans une forme que les sens peuvent percevoir. Dans l’œuvre qui en résulte s’ouvre un espace de potentialité. Bien que cet espace contienne de l’énergétique, de l’affectif, de l’indéterminé et de l’ambigu, notre regard est guidé dans une direction précise qui génère du sens. En découle une conclusion perceptible par les sens, qui déclenche un échange émouvant d’associations dans le champ relationnel qui lie le créateur, l’œuvre et le récepteur» (p. 117).

La précision avec laquelle Andina-Kernen relie les diverses théories psychanalytiques qui ont été élaborées depuis Freud sur le thème de la «croissance psychique» force le respect, tout comme la description qu’elle fait de sa méthodologie de travail avec les patients.

Littérature

Andina-Kernen, A. (2021). Psychisches Wachsen. Symbolisierung, Metapher und künstlerisches Schaffen aus psychoanalytischer Sicht. Basel: Schwabe. 

Andina-Kernen, A. (2017. Vom Zauber der Worte. Zum Sprung vom Somatischen ins Psychische und zur Bedeutung von Metaphern. ZPTP, 32, 2/3, 125-217.

Andina-Kernen, A. (1996). Über das Entstehen von Symbolen. Basel: Schwabe).  
 

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